Chapitre 69

 

Richard jura entre ses dents quand le cheval s’écroula sous lui, raide mort. Après un roulé-boule dans la neige, il se releva, alla récupérer ses affaires sur la selle de l’animal, puis rendit silencieusement hommage à son courage et à son dévouement.

Il avait perdu le compte des étalons et des juments qui avaient galopé jusqu’au bout de leurs forces. Certains s’étaient simplement arrêtés net, refusant de faire un pas de plus. D’autres, après être passés au trot, n’avaient plus jamais voulu accélérer. D’autres encore, comme celui-là, avaient fendu le vent jusqu’à ce que leur cœur explose.

Conscient d’être trop dur avec eux, le Sourcier avait tenté de se maîtriser. Mais impossible de ralentir le rythme ! Dès qu’une monture l’avait laissé tomber, il s’était débrouillé pour en trouver une autre. Quelques propriétaires s’étaient fait tirer l’oreille, histoire d’augmenter les enchères. Une grosse poignée de pièces d’or les avait promptement ramenés à de meilleurs sentiments.

Ayant dormi et mangé à peine, Richard était au bord de l’épuisement. Parfois obligé de marcher pour soulager un cheval, il courait comme un fou dès qu’il fallait en dénicher un autre.

Il hissa le sac sur son épaule et repartit. Son départ de D’Hara remontait à deux semaines. Aydindril ne devait plus être très loin.

Le solstice d’hiver était passé depuis longtemps. Mais ça ne comptait pas dans l’esprit du Sourcier, étrangement persuadé qu’il pourrait encore, s’il se hâtait, épargner à Kahlan un sort atroce. Comme si le temps, ému par sa détermination, avait pu décider de l’attendre !

Haletant, il s’arrêta au sommet d’une butte. Devant lui, sous un soleil étincelant, s’étendait enfin Aydindril. Au loin, adossée au flanc des montagnes, se dressait la Forteresse du Sorcier.

Richard courut dans la neige.

Les rues de la ville étaient noires de monde malgré le froid mordant. Alors qu’il se frayait un chemin dans la foule, le jeune homme vit que l’Épée de Vérité attirait tous les regards. Prudent, il la dissimula sous la cape du mriswith.

Le boniment d’un colporteur, au coin d’une ruelle, le tira de ses pensées.

— Qui veut des cheveux d’Inquisitrice ! beuglait le type. Une mèche de la Mère Inquisitrice, tout droit venue de son infâme tête. Il n’en reste plus beaucoup ! Un magnifique souvenir pour vos enfants !

Richard reconnut les longs cheveux de Kahlan, pendus à un poteau. Il les décrocha et les glissa sous sa chemise. Leur « propriétaire » tenta de les récupérer. D’une main, son « voleur » le prit par le col, le souleva de terre et le plaqua contre un mur.

— Où as-tu eu ça, chien ?

— C’est le… Conseil. Oui, je les ai achetés au Conseil, pour les vendre. Au secours ! Au secours ! On me détrousse !

Quand une petite foule accourut pour défendre le type, Richard dégaina son épée. Les intrépides sauveteurs détalèrent… et le colporteur leur emboîta le pas.

Bien qu’il eût rengainé son épée, Richard sentit sa colère augmenter tandis qu’il se dirigeait vers le palais, bien visible dans le lointain.

Kahlan ne lui avait pas menti : l’édifice était somptueux.

Elle lui avait aussi parlé d’une cuisinière… Non, d’une chef de cuisine, qui s’appelait… Bon sang, quel était son nom ? Sand quelque chose… Sanderholt ! Maîtresse Sanderholt !

Les odeurs de nourriture le guidèrent vers l’entrée de l’office. Il poussa les portes, fonça dans les cuisines et vit reculer devant lui une légion de maîtres queux et de marmitons. À l’évidence, ces gens ne voulaient en rien avoir affaire avec lui.

— Sanderholt ! beugla-t-il. Je cherche maîtresse Sanderholt ! Où est-elle ?

Deux ou trois personnes désignèrent un couloir. Avant que le Sourcier y ait fait dix pas, une femme très mince vint à sa rencontre.

— Qui m’appelle ? Et que se passe-t-il ?

— C’est moi qui veux vous voir, dit Richard.

— Que puis-je faire pour toi, jeune homme ? demanda la vieille femme en le dévisageant.

Richard tenta de parler d’une voix aussi peu menaçante que possible. Le résultat ne lui parut pas très convaincant.

— Kahlan… Je cherche Kahlan !

— Tu dois être Richard, dit maîtresse Sanderholt, très pâle. Oui, tu corresponds parfaitement à la description… Elle m’a parlé de toi, tu sais !

— Où est-elle ?

— Richard, le Conseil l’a condamnée à mort… Elle a été exécutée lors du festival du solstice d’hiver. Je suis navrée, mon garçon…

Le Sourcier se demanda s’ils parlaient de la même personne.

— Je crois qu’il y a un malentendu… Ma Kahlan est la Mère Inquisitrice. Elle ne peut pas être morte. Je suis venu aussi vite que possible, car…

Maîtresse Sanderholt essuya ses yeux ruisselants de larmes et secoua la tête.

— Viens, mon enfant, dit-elle en lui posant une main bandée sur le bras. Tu as l’air affamé. Un bon bol de soupe te réconfortera.

Richard laissa tomber sur le sol son arc, son carquois et son sac.

— Le Conseil l’a condamnée à mort ? répéta-t-il.

— Oui… Elle s’est échappée, mais ses juges l’ont reprise et ont confirmé la sentence devant le peuple, le jour de la décapi… de l’exécution. Tous les conseillers rayonnaient et le peuple applaudissait.

— Elle s’est peut-être évadée au dernier moment… C’est une femme pleine de ressources.

— J’étais là, souffla maîtresse Sanderholt d’une voix brisée. Ne me force pas à raconter ce que j’ai vu. J’adorais Kahlan depuis toujours…

Y avait-il un moyen de remonter dans le temps pour arriver avant la catastrophe ? se demanda Richard, au bord de la folie. Bon sang, ce devait être possible !

Non, tout était accompli. Pour vaincre le Gardien, il avait dû laisser mourir Kahlan. La prophétie l’avait battu à plate couture.

— Où est la salle du Conseil ?

La vieille femme hésita, puis désigna un couloir et donna au Sourcier les indications requises.

— Richard, gémit-elle, je l’aimais aussi… Mais c’est trop tard. Tu ne peux plus rien faire…

Le jeune homme était déjà parti. À peine conscient de ce qui l’entourait, il avançait vers sa destination finale comme une de ses flèches volant vers la cible, après qu’il l’eut appelée.

Le palais grouillait de gardes, mais il s’en fichait. Se souciaient-ils de sa présence ? Il l’ignorait et ça ne l’inquiétait pas. Les bruits de bottes et d’armures atteignaient à peine ses oreilles. Et pour voir les soldats postés sur les balcons, il aurait dû lever la tête…

Devant les portes de la salle du Conseil, au bout d’un couloir à colonnades, des hommes tentèrent de lui barrer le chemin. Sans dégainer son épée, Richard avança. La magie se déversa dans ses veines, flot de fureur et de haine.

Le Sourcier voulait voir disparaître les misérables moustiques qui se dressaient sur son chemin ! Le pouvoir jaillit de lui sans qu’il l’ait invoqué, comme par réflexe. Il sentit l’air vibrer et vit les murs, autour de lui, se couvrir de sang.

Richard émergea du vortex de flammes qu’il venait de déchaîner et franchit le trou, dans le mur, qu’il avait percé sans même y penser. Derrière les portes pulvérisées, des débris, des pièces d’armure et des corps jonchaient le sol.

À l’autre bout de la salle, les hommes tapis à l’abri de sièges et de bureaux se relevèrent d’un bond. Le pas toujours aussi vif, Richard dégaina son épée. La note métallique retentit comme un glas…

— Je suis le Conseiller Suprême Thurstan, cria l’homme debout près du siège le plus imposant. Que signifie cette intrusion ?

— Parmi vous, lança Richard, y en a-t-il un qui n’ait pas voté la mort pour la Mère Inquisitrice ?

— Elle a été condamnée pour trahison ! À l’unanimité, et dans la plus stricte légalité. Gardes, emparez-vous de cet homme !

Des soldats accoururent, mais le Sourcier avait déjà pris pied sur l’estrade.

Les conseillers tirèrent leurs couteaux.

L’Épée de Vérité coupa Thurstan en deux, du sommet du crâne à l’entrejambe. Un coup latéral fit sauter des têtes et les survivants tentèrent de poignarder leur agresseur.

Des amateurs, trop lents pour être dangereux. Implacable, le Sourcier abattit tous les dignitaires, y compris ceux qui essayaient de fuir.

Tout fut terminé avant que les gardes aient atteint l’estrade.

Richard s’adossa au lutrin, l’arme tenue à deux mains. Qu’ils viennent donc, ces champions du mal. Il n’attendait que ça !

— Je suis le Sourcier ! cria-t-il. Ces hommes ont assassiné la Mère Inquisitrice et je viens de les châtier. À vous de choisir ! Voulez-vous avoir la gorge tranchée, ou vous ranger du côté du droit ?

Les soldats ralentirent, se consultèrent du regard et s’immobilisèrent.

Un officier étudia le trou, dans le mur, puis balaya les débris du regard.

— Êtes-vous un sorcier ?

— À ton avis, soldat ?

Le type rengaina son épée.

— Les histoires de magie ne nous regardent pas. Je ne mourrai pas pour une affaire qui dépasse mes compétences.

D’abord lentement, puis de plus en plus vite, tous les gardes rengainèrent leurs armes. Se détournant, ils quittèrent la salle, où Richard resta bientôt seul.

Il sauta de l’estrade et examina le grand fauteuil, miraculeusement épargné par le sang. Le siège de Kahlan… Celui où elle avait dû prendre place tant de fois…

Richard remit au fourreau l’Épée de Vérité. C’était fini. Tout ce qui devait être accompli l’avait été.

Les esprits du bien l’avaient abandonné. Et ils s’étaient détournés de Kahlan. Après tant de combats menés en leur nom, ils n’avaient rien fait pour aider leurs champions.

Que le Gardien les emporte !

Richard tomba à genoux. Il voulut ressortir son épée, mais se ravisa. Avec sa magie, l’arme ne conviendrait sûrement pas pour ce qu’il prévoyait de faire.

Mais le couteau, en revanche…

Le Sourcier avait rempli sa mission. Désormais, il ne servait plus à rien.

Il plaça la pointe du couteau contre sa poitrine.

Très calme, il baissa les yeux pour s’assurer qu’il visait bien son cœur.

Les cheveux de Kahlan repris au colporteur dépassaient de sa chemise. De sa poche, il sortit la mèche qu’elle lui avait offerte pour qu’il n’oublie jamais à quel point elle l’aimait.

Il était temps d’en finir avec la douleur.

 

— Elle est réveillée, dit le prince Harold. Et elle vous demande…

Kahlan leva les yeux de la cheminée, dont elle contemplait les flammes. Puis elle jeta un regard glacial au vieux sorcier assis sur un banc près d’Adie. Si Zedd avait recouvré la mémoire, la dame des ossements restait dans le brouillard. Persuadée de se nommer Elda, elle était toujours aveugle…

L’Inquisitrice traversa la salle à manger déserte. À leur arrivée, l’auberge était vide, comme le reste de la ville. Tout ça à cause de l’avancée irrésistible des forces de Kelton.

Une excellente étape pour se reposer un peu de deux semaines de fuite éperdue.

Une semaine après leur départ d’Aydindril, Zedd, Adie, Ahern, Jebra, Chandalen, Orsk et Kahlan avaient été interceptés par le détachement du prince Harold. Ayant survécu au massacre perpétré dans la cour du palais, il avait attendu le jour de l’exécution de sa sœur. Au prix d’une héroïque intervention, ses soldats et lui avaient arraché Cyrilla à la hache du bourreau.

Quatre jours plus tard, la petite colonne avait rencontré le capitaine Ryan et ses neuf cents survivants. Il ne restait pas un soldat de l’Ordre Impérial. À un prix terrible, les « gamins » de Kahlan avaient accompli leur mission.

Bien qu’elle se fût gardée de le leur montrer, même l’annonce de leur victoire ne parvint pas à remonter le moral de l’Inquisitrice.

Après avoir pris une compresse dans une cuvette, Kahlan s’assit au bord du lit où reposait sa demi-sœur.

Cyrilla était consciente, mais ça ne durerait pas… Au bout de quelques minutes, elle retombait immanquablement dans son hébétude. Aveugle, sourde et muette, elle se coupait alors totalement du monde.

Dans ses moments de lucidité, elle pleurait sans cesse et ne supportait pas d’autre interlocuteur que Kahlan. Apercevoir un homme la faisait hurler… ou replonger dans sa transe.

— Kahlan, tu as réfléchi à ma proposition ? demanda-t-elle pendant que l’Inquisitrice lui humidifiait le front.

— Oui. Je ne veux pas devenir la reine de Galea. De toute façon, la place est déjà prise. Par toi.

— Je t’en prie, Kahlan… Le peuple a besoin d’un chef solide, et je ne suis plus en état de jouer ce rôle.

— Cyrilla, tout s’arrangera, tu verras…

— Je ne peux plus régner, à présent…

— Cyrilla, je comprends mieux que tu ne le penses. J’ai été dans ce trou, avec les brutes… Même si mon sort fut plus clément que le tien, je sais ce que tu éprouves. Mais tu te remettras. Je le jure !

— Accepteras-tu la couronne ? Pour le bien du peuple…

— Si j’y consens, ce sera temporaire, jusqu’à ce que tu sois rétablie.

— Non…, gémit Cyrilla. Par pitié ! Esprits du bien, aidez-moi… non…

Sur ces mots, la reine replongea dans son monde intérieur peuplé d’atroces visions. Kahlan l’embrassa sur la joue et se leva.

— Comment va ma sœur ? demanda Harold, qui attendait sur le seuil de la chambre.

— Il n’y a pas d’améliorations… Mais ça viendra, soyez sans crainte.

— Kahlan, vous devez lui obéir. C’est la reine !

— Et pourquoi ne deviendriez-vous pas roi ? Ce serait plus logique.

— Ma place est sur les champs de bataille, pour défendre mon peuple et les Contrées du Milieu. Comment me battre si je dois assumer la gestion d’un royaume ? Je suis un soldat et ça me suffit amplement. Vous vous nommez Kahlan Amnell, fille du roi Wyborn. La couronne vous revient.

Kahlan voulut rejeter ses cheveux derrière son épaule, mais ils n’étaient plus là. Comme on avait du mal à perdre les habitudes de toute une vie !

— J’y réfléchirai…, dit-elle en s’éloignant.

Elle se campa de nouveau devant la cheminée, l’unique source de lumière de la pièce. Devant ses yeux, le bois jadis vivant se transformait en cendres. Le sort de chacun en ce monde…

Personne n’osa la déranger.

Après un long moment, elle s’aperçut que Zedd se tenait derrière elle. Il lui avait fallu du temps pour s’habituer à le voir dans cette tenue excentrique…

— Un peu de thé te ferait du bien, dit-il en brandissant une tasse.

— Non, merci…

— Kahlan, cesse de t’accabler de reproches. Ce n’est pas ta faute…

— Vous mentez mal, sorcier. J’ai vu la haine, dans vos yeux, quand j’ai raconté mon histoire. Vous vous souvenez ?

— Je t’ai déjà expliqué ça ! J’étais sous le coup d’un sort jeté par trois magiciennes. Seul un choc émotionnel pouvait le neutraliser. La colère a fait l’affaire. Mais pour que ça marche, elle devait être dévastatrice. Ne me suis-je pas déjà excusé ?

— Vous vouliez me tuer !

— Je devais agir ainsi, Mère Inquisitrice.

— Kahlan… Ce titre ne veut plus rien dire.

— Prends le nom qui te chante, tu resteras quand même ce que tu es ! Te voiler la face n’y changera rien. Et quant à mon comportement, il était inévitable. Pour qu’un sort de mort fonctionne, il faut que la personne concernée croie qu’elle va mourir. Ma mémoire revenue, j’ai compris que c’était la seule solution. Un acte désespéré, mon enfant… Si je ne t’avais pas convaincue que je voulais ta mort, le peuple n’aurait pas cru qu’il assistait à ton exécution.

Kahlan frissonna à ce souvenir. Jusqu’à son dernier souffle, elle n’oublierait jamais le contact glacial du sort de mort.

— Vous auriez pu abattre les conseillers. Me sauver en massacrant ces chiens !

— Comme ça, tout le monde aurait su que tu avais survécu. À l’heure actuelle, nous aurions à nos trousses l’armée et une bonne partie de la populace. Avec ma façon de faire, on nous fiche la paix, et nous pouvons nous consacrer à notre devoir.

— Débrouillez-vous tout seul ! Moi, j’ai démissionné. La cause des esprits du bien ne m’intéresse plus.

— Kahlan, tu sais ce qui arrivera si nous baissons les bras. L’automne dernier, tu es venue en Terre d’Ouest me convaincre de reprendre le combat. Grâce à toi, je suis retourné à la magie, j’ai aidé les innocents, et j’ai contribué à priver notre adversaire de la victoire.

— Les esprits du bien ont trouvé judicieux de ne pas intervenir. Ils n’ont pas bronché quand j’ai livré Richard aux Sœurs de la Lumière. Un seul signe d’eux, et l’homme que j’aime ne serait pas perdu à jamais ! Mais ils ont choisi l’autre camp…

— Ils ne sont pas là pour diriger le monde des vivants, Kahlan. C’est notre travail et notre responsabilité à tous.

— Allez raconter ça à quelqu’un qui s’en soucie !

— Tu t’en soucies, mais pour le moment, tu n’en as pas conscience. J’ai perdu un être cher, comme toi. Dois-je me détourner du bien ? Richard t’aurait-il aimée si tu étais du genre à abandonner ceux qui ont besoin d’aide ?

L’Inquisitrice encaissant le coup, Zedd poussa son avantage.

— Il t’aime en partie à cause de ta passion pour la vie ! Parce que tu tes battue pour elle avec autant d’ardeur que lui !

— Richard est la seule faveur que j’aie demandée aux esprits du bien. Et voyez où j’en suis ! Il pense que je l’ai trahi. De fait, je l’ai forcé à porter un collier – son pire cauchemar ! Zedd, je ne suis pas capable d’aider les autres…

— Kahlan, tu as un pouvoir magique. Et la magie ne doit pas mourir, parce qu’elle protège le monde des vivants. Sans elle, notre univers serait en danger, et il disparaîtrait peut-être…

» Personne ne sait que nous sommes toujours prêts à combattre. Nous irons à Ebinissia, ce que nos ennemis ne prévoient pas, et nous unirons les forces des Contrées pour organiser une contre-attaque. Et nul ne saura, avant qu’il soit trop tard, que nous aurons relevé la ville de ses cendres.

— D’accord ! Si ça peut vous fermer le clapet, j’accepte de régner sur Galea. Jusqu’à la guérison de Cyrilla…

— Mère Inquisitrice, tu sais que ce n’est pas de ça que je parlais, dit le sorcier.

Kahlan se mordit les lèvres pour ne pas pleurer devant lui.

— Les anciens sorciers ont créé les Inquisitrices, continua Zedd. Elles détiennent une magie unique et tu es la dernière de toutes. Ton pouvoir ne doit pas mourir avec toi, Kahlan. Richard est perdu pour nous, mais il faut continuer quand même. La vie et la magie devront être transmises. Tu dois choisir un partenaire et offrir au futur les bienfaits de ton pouvoir.

Kahlan ne répondit pas, le regard perdu dans les flammes de la cheminée.

— Mon enfant, murmura le vieil homme, fais-le au nom de l’amour que Richard éprouvait pour toi. Et de la confiance qu’il t’accordait.

Kahlan se retourna enfin. Près de Chandalen, assis en tailleur sur le sol, Orsk ne la quittait pas du regard. Toutes les autres personnes, dans la salle, faisaient mine de ne pas la voir.

— Orsk, appela-t-elle.

Le colosse se leva d’un bond et accourut. Il se campa devant elle, tête inclinée, à ses ordres, qu’il s’agisse de lui servir une tasse de thé… ou de tuer quelqu’un.

— Orsk, monte dans ma chambre et attends-moi.

— Bien, maîtresse.

Il gravit les marches à toute vitesse. Kahlan entendit craquer le lit quand il s’assit dessus.

Lorsqu’elle s’engagea à son tour dans l’escalier, Zedd la retint par le bras.

— Mère Inquisitrice, tu trouveras certainement un compagnon mieux adapté à tes goûts…

— Quelle différence ça fera ? Je l’ai déjà touché avec mon pouvoir. Inutile de nuire à quelqu’un d’autre pour une raison aussi insignifiante…

— Kahlan, je n’ai jamais dit que ça devait être ce soir ! Un jour, tu devras t’y résoudre. Mais tu as le temps…

— Aujourd’hui, demain ou l’année prochaine… Ça changera quoi ? Dans une décennie, ce sera pareil. Les sorciers se servent des Inquisitrices depuis des milliers d’années. Pourquoi perdre les bonnes habitudes ? Pour vous satisfaire, je vais agir sans tarder.

— Tu ne dois pas le prendre ainsi. L’espoir de la vie est en cause.

Kahlan vit du chagrin dans les yeux du vieil homme. Mais elle n’éprouva aucune pitié pour lui.

— Appelez ça comme vous voudrez ! Le nom importe peu : ça reste un viol ! Mes ennemis n’y sont pas parvenus. Il aura fallu que mes amis s’en chargent…

— Je sais ce que tu ressens, mon enfant… Tu ignores à quel point je le sais !

Kahlan voulut monter les marches, mais Zedd l’en empêcha.

— Tu veux bien me faire une petite faveur, avant ? Va te promener un peu, pour réfléchir et demander conseil aux esprits du bien. Implore-les de te guider, et…

— Je n’ai rien à leur dire ! C’est eux qui m’imposent ce calvaire. Ils parlent par votre bouche, Zedd.

— Alors, fais-le pour Richard.

Kahlan hésita. Puis elle se détourna et approcha de la porte du jardin de l’auberge.

— Pour Richard, dit-elle en sortant.

La pierre des larmes - Tome 2
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